
La question des adaptations d’examens constitue le second grand enjeu du processus de scolarisation des élèves handicapés, et non des moindres. Une situation de handicap est de nature à impliquer une plus grande exposition de l’élève à la lenteur et à la fatigabilité, désavantages à qui il incombe donc aux autorités de compenser.
Si, une fois de plus, cet aspect demeurait moins encadré lors de ma scolarité qu’à l’heure actuelle où celui-ci est géré par la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH), il me semble une nouvelle fois aux vues de certains témoignages que la prise en compte de chaque handicap et de chaque difficulté au sein des adaptations ne soit toujours pas effective. Si chaque handicap est propre, il peut s’avérer indispensable de mettre en place plusieurs adaptations techniques ou logistiques assurant à l’élève un suivi sans entrave des divers enseignements. J’ai une fois de plus, lors de mes consultations de plusieurs articles de presse, pu constater que l’Éducation Nationale restait encore frilleuse à assurer l’adaptation des supports et des techniques d’enseignement (braille, agrandissement des caractères sur les sujets d’examens). Reste également irrésolue la dibiculté des adaptations d’examens dont beaucoup font encore l’objet de refus. Une fois de plus, ma propre expérience en dit long sur la défaillance totale de l’Éducation Nationale à répondre à cette problématique. Mon handicap implique ainsi une nécessité pour moi de travailler uniquement sur support informatique avec du matériel adapté (ordinateur, joystick et clavier adapté avec un guide-doigts) en raison de mon incapacité à tenir un stylo. Par ailleurs, si mes problèmes de mobilité sont responsables de la lenteur absolue de mon processus d’écriture et du décuplement de ma fatigabilité, il est donc indispensable de remédier à ces difficultés par la mise en place de certaines adaptations (notamment allongement de la durée de l’épreuve et adaptation des sujets). Cette question a posé des difficultés majeures lors de mon passage de l’examen du Brevet des Collèges pour lequel le refus par l’Éducation Nationale de l’adaptation des sujets me contraignit à des compositions dans des conditions lamentables et qui furent d’une durée interminable. C’est sans compter l’épreuve de l’oral d’Histoire des Arts dont on avait prétendu m’accorder une dispense toute l’année pour finalement me prévenir quelques semaines avant de ma comparution obligatoire à celle-ci, sans même me permettre de fournir un écrit, ce qui constitue une méthode bien plus adaptée à mes difficultés d’élocution ! La gravité de la situation ne fut pas en s’améliorant au lycée lors de mon année de seconde, durant laquelle l’octroi du temps supplémentaire me fut systématiquement refusé ! Ainsi, si je suis enfin parvenue l’an passé à la validation de mon diplôme de Master, c’est bien en raison du fossé considérable existant entre les conditions d’accueil en milieu classique et celles m’ayant été accordées par la faculté. Aux suites de mon année de Seconde, je fis le choix de m’orienter vers une Première Littéraire au CNED, par lassitude envers les diffcultés déjà vécues, qui refreinèrent donc mon envie de passer le Baccalauréat. C’est alors que je découvris par le fruit du hasard l’existence d’une formation de Capacité en Droit offrant une équivalence de celui-ci pour intégrer la première année de Licence. Les conditions dans lesquelles m’accueillit la responsable de cette formation assurée au sein de l’École de Droit de Clermont-Ferrand témoignèrent du fossé considérable existant entre la perception du handicap affichée par l’Éducation Nationale et celle régnant au sein de l’enseignement supérieur, accordant bien davantage de souplesse aux professionnels. Par le fruit d’un accord entre la Responsable de formation et le médecin universitaire qui firent preuve de beaucoup d’humanité et de bienveillance, je fus autorisée à assister aux cours accompagnée de ma maman dont on refusait systématiquement la présence en milieu classique lorsqu’elle se proposait comme remplaçante. De plus, l’application de l’ensemble des adaptations d’examens, systématiquement refoulés dans le passé, me fut accordée sans entrave aucune (utilisation de mon matériel, temps supplémentaire, salle à part, adaptation des oraux en écrit et réduction des sujets) et fut mise en oeuvre avec bienveillance par les responsables de l’administration.
Conclusion
L’inclusion scolaire est une aubaine permettant l’intégration des personnes en situation de handicap à notre société. En plus du grand nombre de savoirs et compétences qu’il me fut permis d’acquérir tout au long de ma scolarité, celle-ci fut le tremplin de mon insertion au monde des valides, duquel les institutions spécialisées m’auraient considérablement éloignée. En effet, mon cursus scolaire ainsi qu’universitaire fut une incroyable opportunité pour moi de m’intégrer au monde des valides et de nouer avec eux nombre de liens affectifs et amicaux. Si je peux assurer ne jamais, ou du moins, à de très rares occasions avoir été l’objet d’éventuelles moqueries, mon inclusion au sein de structures éducatives classiques m’ouvrit alors les portes vers le monde qui m’entourait, et vers mes rencontres avec mes amis et mes professeurs. Mon expérience montre ainsi un exemple très concret des chances inestimables offertes par l’insertion scolaire aux personnes handicapées d’être intégrées à la société, de développer l’ensemble des savoirs indispensables à l’exercice d’une pleine citoyenneté, de connaître nombre d’interactions sociales utiles à se découvrir en tant qu’être humain, de découvrir l’autre et connaître ainsi une existence sur le plan social, susceptible de déboucher sur un éventuel avenir professionnel. Il est également important d’ajouter que la présence de personnes handicapées constitue non seulement une chance pour celles-ci mais également pour les autres élèves et même les professeurs, obrant l’occasion de changer de perspective, car l’inclusion constitue un moyen pour chacun de s’adapter et de grandir. En effet, il est intéressant de se référer aux témoignages de certains enseignants lesquels confiaient que ma présence au sein de leurs classes contribuait à instaurer un esprit d’entraide, de solidarité, lequel n’était pas systématiquement observé, du moins pas à la même échelle, au sein des autres classes. De plus, il est sans conteste que la poursuite par une personne handicapée d’un parcours scolaire en milieu classique représente la meilleure opportunité en sa faveur de découvrir ses goûts, ses attraits, de développer des connaissances et des opinions, de se forger un avis subjectif et personnel au sujet de la société qui l’entoure et ainsi de révéler ses compétences et ses talents.
